20 mars, 2010

Pédophilie ecclésiastique et conscience de classe

"Quand vous pensez, mon cher Robert, qu'au cours de la conversation que nous avons eue, il a fini par me dire les raisons exactes pour lesquelles il m'avait convoqué. Des bruits courraient qu'il y a quelques années, j'aurais touché certains des jeunes gens que j'emmenais faire du bateau sur la Loire ! Moi ? enfin vous me connaissez, mon cher Robert ! Quand je pense à tous ces dimanches que je leur ai consacrés ! D'ailleurs lui ai-je répondu, il n'y a jamais eu la moindre suspicion de la part des parents. Imaginez vous que le professeur X, le bâtonnier Y , le docteur de Z m'auraient confié leurs garçons s'ils avaient pensé un instant que je sois "comme ça" ? "
J'écoutais ça, que cet imbécile classieux racontait à mon père, les ennuis qu'il avait avec son archevêque. Oser parler ainsi en ma présence, moi qui depuis des années, après un long trajet en voiture au cours duquel il m'avait, profitant de la promiscuité, tripoté (et je m'en tirais bien) les tétons sans vergogne, faisais en sorte de ne jamais me retrouver seul avec lui, oh, pas par vertu, mais parce qu'il me déplaisait souverainement... En attendant, je le regardais d'un oeil amusé et narquois, l'abbé, carré dans son fauteuil voltaire près de son superbe piano à queue, une CravenA fichée dans son fume-cigarette et son verre de whisky à la main. Car moi je le savais ! qu'il était "comme ça", comme il, comme on disait pudiquement ; il savait que je savais mais il pensait comme toujours, que je culpabilisais à l'instar de toutes les victimes à l'époque et ce suffisamment pour fermer ma gueule (personne de toute façon ne m'aurait cru)... En fait je m'en foutais... et je vais vous dire maintenant pourquoi je m'en foutais. Je sais, c'est odieux, mais c'était par réflexe de classe. Nous n'étions pas, mes frères d'abord et moi longtemps après, assez chic pour qu'il nous invitât à souquer avec les garçons de la bourgeoisie tourangelle... Le mépris qu'il nous portait, c'est la seule raison pour laquelle nous avions été épargnés*... Quand aux petits jeunes gens, fils d'avocats, fils de médecins qu'il embrigadait sur son voilier, j'en conviens aujourd'hui, c'est dégueulasse, mais à l'époque et ce jour là, je me disais que c'était leur prix à payer à ces petits cons déjà imbus de leurs petites personnes pour vivre leur snobisme naissant et leur statut social ... Petit

* Petit codicille ajouté à ce texte après les commentaires :
Ça me rappelle à l'instant que dans le "Salo" de Pasolini, les prédateurs fascistes qui rôdent dans la campagne lombarde pour trouver leurs victimes ne prennent pour les massacrer et selon leurs critères que les plus beaux et les plus belles, abandonnant les autres, le "tout venant", après examen ...

3 commentaires:

LESA FAKER a dit…

un truc qui me tracasse: les pères de ces fils de bourges ont eux mêmes fait l'objet du meme traitement , par les curés de la génération d'avant.
pourquoi cette perpétuation de la tradition?
rite d'initiation , rite de cassage comme le bizutage?
inceste par curé interposé?
déni de sa propre integrité?
sadisme / masochisme?

construction sociale basée sur la violence la mort symbolique l'individu?
la survie de la caste avant tout?

P. P. Lemoqeur a dit…

Et bien c'est exactement la bonne question, et j'en ai en partie la confirmation de la justesse.
Une excellente amie à moi professeur dans un collège privé confessionnel et sous contrat nous disait qu'effectivement nombre de pères qui avaient été confrontés plus ou moins violemment à la question s'empressaient pour des raisons qu'il serait intéressant de leur poser, d'envoyer leurs fils au même endroit subir les mêmes assauts.

ours impatient a dit…

une castration symbolique ? vieux relent de l'époque où un fils tuait fatal'ment le père un jour ou l'autre pour s'approprier son héritage ?

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