20 juillet, 2010

L'art d'improviser

Mes amis vous le diront : c’est chez moi une marotte... J’imagine que la meilleure musique d’orgue française de la période dite "baroque" n’a pas été écrite mais improvisée, ce qui, conviendront ceux qui ne se sont pas encore lassés de l'écouter, est probable, exception faite du superbe, du génial Grigny. On sait par exemple que l’on accourait de tout Paris pour écouter Balbastre improviser ; on peut en conclure que ses improvisations étaient excellentes et bien meilleures que sa musique écrite, d‘où ce succès qui gênait le clergé témoin impuissant de la transformation des églises en salles de concert. C’est sans doute vrai pour tous les autres et pas seulement ceux de la fin du XVIII°siècle.
Improviser est une chose extraordinaire car vous êtes, c'est un truisme, à la fois et au même moment le compositeur et l’interprète de votre oeuvre qui, tant que ne seront pas inventés les moyens d’enregistrements modernes, resteront merveilleusement et regrettablement éphémères.... Il ne faut pas confondre l’improvisation avec la tout aussi respectable pratique de la musique de tradition orale qu’on pourrait confondre du seul fait qu’elle s’exonère elle aussi de partitions.
Certains compositeurs improvisateurs doués d’une mémoire excellentes ont pu retranscrire de mémoire certaines de leurs improvisations qui n’avaient pas été enregistrées. C’est le cas de Marcel Dupré. D’autres ont accepté après coup qu’on transcrive leur improvisations enregistrées. C’est le contrat entre Duruflé et Tournemire. Peut-être à l’époque baroque, les compositeurs ont-ils écrits certaines de leurs improvisations sans s‘en vanter... Buxtehude, Bach sans doute.
Les grands improvisateurs actuels sont de toute évidence les organistes. Les musiciens de jazz peuvent faire preuve de génie dans cet exercice, mais la réitération obligatoire, pour des questions absurdes de rituels inhérents au genre, de l’exploitation de thèmes, de standards ressassés, les pousse de fait à répéter des formules qui font de leur art une musique sans doute non écrite mais aussi plus vraiment improvisée.
La première vidéo qui suit est étonnante car elle montre un talent inouï, celui de Michel Chapuis improvisant dans le style d’une époque et réussissant une oeuvre de qualité égale et j’ose dire supérieure à celle des oeuvres originales de cette époque. Il s’agit d’une histoire entre lui et le passé.
La seconde
vidéo montre Pierre Cochereau improvisant superbement dans le style qui était le sien. Il s’agit d’une histoire entre lui et lui.
Les deux sont extraordinaires. Ils ont des tics, des formules diront les chagrins. Les compositeurs aussi et c’est
moins pardonnables car ils ont eux, comme les peintres, le droit au “repentir”.
Il va de soi qu'il y a de nos jours de jeunes et inspirés improvisateurs.

Chapuis


Cochereau


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